Le mot vient de deux racines grecques qui signifient « bon » et « nourriture ». Le mot eutrophisation est utilisé pour décrire un phénomène naturel lent, à l'échelle de dizaines ou de centaines de milliers d'années, et un phénomène d'origine anthropique rapide ( quelques années ou dizaines d'années ).
Les lacs connaissent une évolution naturelle très lente. Dans les eaux profondes seul le plancton peut se développer, les macrophytes ne peuvent s'enraciner que sur les rives. Tant qu'il n'y a pas de rejets par l'homme les eaux du lac peuvent rester ainsi très longtemps, voire indéfiniment, oligotrophes, c'est-à-dire pauvres en nourriture.
Le plus souvent les eaux des lacs s'enrichissent peu à peu des apports du bassin versant, des retombées atmosphériques, et la vie qui s'y développe amorce un cycle de production de matière par la photosynthèse, les chaînes alimentaires et le recyclage de la matière morte. Ce recyclage libère les éléments minéraux assimilables qui deviennent disponibles pour un nouveau cycle de production.
Peu à peu les apports du bassin versant et le dépôt par sédimentation de matière organique comblent le lac. Au début il produisait en petite quantité, des poissons « nobles », truites, ombles... puis le lac se comble, la végétation aquatique se développe, le lac est eutrophe, il nourrit bien, et produit en grande quantité des poissons blancs, gardons, tanches... avant de finir son évolution comme zone humide. Tout au long de sa très longue vie il aura pleinement assuré les fonctions liées à chacun des stades de son évolution.
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On désigne par le même terme d'eutrophisation, mais certains scientifiques préfèrent utiliser le mot dystrophisation, un phénomène qui se développe sur un temps très court de quelques années à quelques dizaines d'années suite à un apport excessif d'éléments nutritifs. Cette eutrophisation là est liée aux activités humaines.
Elle affecte de préférence les eaux closes ou à faible renouvellement mais aussi les cours d'eau à courant lent et certaines zones côtières. La présence de phosphore en excès est la cause principale de l'eutrophisation. En conditions normales le phosphore est un élément rare dans le milieu aquatique terrestre ce qui limite le développement des algues et des végétaux. L'enrichissement du milieu aquatique en phosphore se fait par les rejets urbains et la pollution d'origine agricole, qu'il s'agisse d'engrais chimiques ou d'effluents d'élevages entraînés par le ruissellement.
L'eutrophisation se traduit d'abord par une modification de la composition de la flore au niveau des algues et éventuellement des macrophytes. On observe une réduction de la diversité des espèces présentes, et la prolifération de certains groupes d'algues. La prolifération de la matière végétale en suspension diminue la transparence de l'eau. Certaines espèces proliférantes peuvent libérer des toxines dans le milieu. La décomposition de la matière végétale morte accumulée sur le fond provoque un abaissement spectaculaire du taux d'oxygène disponible dans les eaux profondes et libère de l'ammoniac.
On a calculé que l'apport d'un gramme de phosphore dans un milieu eutrophisé, se traduit par la production de 100 g en poids sec d'algues dont la décomposition consommera 138 g d'oxygène.
Dans un lac oligotrophe la fixation de carbone organique est de l'ordre de 10 mg par m3 et par jour. Elle atteint 100 mg par m3 et par jour dans un lac eutrophe et se concentre dans les eaux superficielles compte-tenu de la perte de transparence de l'eau.
Outre les apports de phosphore, les conditions qui favorisent l'eutrophisation sont un taux élevé de nitrates, une faible profondeur, un faible renouvellement de l'eau et une température de l'eau élevée. L'eutrophisation peut rendre l'eau impropre à tout usage.
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Cyanophycées, Schizophycées, Myxophycées autant de termes qui témoignent des hésitations des spécialistes pour classer les Cyanobactéries appelées aussi algues bleues. Parmi les algues dont elles possèdent la chlorophylle A et divers pigments ? Ou parmi les bactéries avec lesquelles elles partagent certains caractères archaïques ? Ou encore parmi les champignons avec lesquels elles forment de nombreux lichens ?
On en a décrit environ 1 500 espèces réparties dans 120 genres. Elles sont, avec les bactéries, les formes de vie les plus anciennes observées sur terre. Elles sont présentes partout à la surface de la terre, y compris dans les milieux extrêmes : parois des montagnes, déserts, eaux saumâtres, eaux sulfureuses... Elles se reproduisent par simple division et par différentes sortes de spores. Elles sont toujours dépourvues de flagelle, ce qui n'empêche pas certaines d'entre elles d'être mobiles (Oscillatoria).
Les algues bleues sont régulièrement associées aux phénomènes d'eutrophisation auxquels, grâce à la diversité de leurs pigments elles peuvent donner un aspect spectaculaire, avec des colorations qui peuvent passer par toutes les nuances du rouge, du bleu, du vert et du violet. Leur capacité à utiliser l'azote comme source d'énergie leur donne un avantage sur les algues vertes quand la coloration de l'eau limite la pénétration de la lumière. Les eaux calmes, chaudes, la présence d'azote et de phosphore favorisent leur développement. Elles prolifèrent principalement en été et en automne.
Certaines cyanophycées sont à l'origine de la productivité très élevée de certains étangs piscicoles, mais d'autres espèces donnent au poisson une odeur et un goût de vase. Dans les rizières elles peuvent faire office d'engrais vert. Mais la plupart des espèces, 75 % selon certains chercheurs, produisent des substances extrêmement toxiques pour les animaux et pour l'homme. Ces toxines agissent sur le système nerveux, le foie, les reins, les intestins ou la peau.
Les personnes atteintes présentent des symptômes d'empoisonnement, des gastro-entérites, des convulsions, des difficultés respiratoires, un état de fatigue générale. Les essais en laboratoire provoquent la mort d'une souris en quelques minutes par arrêt de la respiration. On les soupçonne également de déclencher des cancers à très long terme.
Contrairement à un pays comme l'Angleterre, en France les accidents dus aux cyanobactéries ne font l'objet d'aucun suivi vétérinaire ou médical : pas de données, pas de problème. « La toxicité des cyanobactéries s'arrête aux frontières de la France comme la radioactivité de Tchernobyl » constate un auteur désabusé.
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Entre août et novembre 2000, 14 sites du bassin Adour-Garonne ont été échantillonnés. Il s'agit de sites qui servent à l'alimentation en eau potable ou qui accueillent des activités nautiques. Des cyanobactéries potentiellement toxiques ont été observées dans 70 % des échantillons. Des concentrations de 11,4 microgrammes de toxines par litre ont été trouvées dans le barrage à Lavaud en Charente. Actuellement il n'existe pas de norme concernant les toxines en eau douce. Les recommandations de l'Office Mondial de la Santé amènent à considérer qu'à partir d'une concentration supérieure à 1 micro-gramme par litre, il existe des risques notables pour l'homme et pour l'environnement.
En Charente-Maritime les études préalables prévoient une prolifération des algues dans le barrage de la Trézence, une retenue de 850 ha destinée à stocker 47 millions de mètres cubes.